Marchés publics et cybersécurité : un enjeu stratégique pour les entreprises
La numérisation croissante des procédures dans les marchés publics a transformé en profondeur la façon dont les entreprises répondent aux appels d’offres. Si la dématérialisation présente des avantages indéniables en termes de transparence et de rapidité, elle expose également les acteurs à de nouveaux risques : cyberattaques, fuites de données, espionnage industriel.
Dans ce contexte, la cybersécurité devient un enjeu stratégique pour toutes les entreprises souhaitant accéder aux marchés publics. Protéger les données sensibles lors des appels d’offres n’est plus une option, mais une exigence pour sécuriser les intérêts économiques et garantir la conformité réglementaire.
Pourquoi les marchés publics sont particulièrement vulnérables aux cybermenaces
Les procédures d’achat public impliquent l’échange d’une grande quantité de données confidentielles entre les opérateurs économiques et les autorités contractantes : propositions commerciales, offres techniques, budgets prévisionnels, documents légaux.
Ces informations précieuses attirent de plus en plus les cybercriminels qui peuvent les revendre ou les utiliser à des fins de chantage ou d’intelligence économique. Plusieurs facteurs expliquent la vulnérabilité spécifique des marchés publics :
- Des plateformes en ligne multiples, parfois peu sécurisées
- Des délais rectricts qui poussent à réduire les étapes de vérifications
- Une interconnexion entre services, prestataires et sous-traitants qui augmente les points d’entrée pour les attaques
- Un manque de formation des équipes aux enjeux de la cybersécurité
Données sensibles et appels d’offres : que faut-il protéger ?
Dans le cadre d’un appel d’offres publié dans le cadre d’un marché public, plusieurs types de données sensibles circulent entre le donneur d’ordre et les entreprises soumissionnaires. Ces données peuvent concerner :
- Les informations financières et comptables
- Les processus de production ou savoir-faire différenciateurs
- Les contrats, attestations et documents administratifs riches en données personnelles
- Les fichiers techniques (plans, schémas, spécifications)
Ce sont précisément ces actifs informationnels que les entreprises doivent sécuriser, non seulement pour protéger leur compétitivité, mais aussi pour respecter le Règlement européen sur la protection des données (RGPD) ainsi que les obligations contractuelles liées à l’achat public.
Les obligations des acheteurs publics et des entreprises en matière de sécurité informatique
La législation française et européenne impose désormais à tous les acteurs du secteur public – et à leurs partenaires – d’assurer la protection des systèmes d’information. Les textes de référence en matière de cybersécurité dans les marchés publics incluent notamment :
- La directive européenne NIS (Network and Information System Security)
- Le Code de la commande publique qui mentionne l’intégration de critères de sécurité dans l’attribution des marchés
- Les obligations liées au RGPD pour les données à caractère personnel
Les acheteurs publics doivent donc intégrer des exigences de cybersécurité dès la rédaction des cahiers des charges, en incluant des clauses techniques relatives à la protection des données et à la résilience des systèmes.
Les entreprises candidates, elles, doivent démontrer leur capacité à respecter ces exigences en apportant des éléments de preuve (certifications ISO 27001, procédures internes, gestion des incidents, etc.).
Les bonnes pratiques de cybersécurité lors de la réponse à un appel d’offres
Pour anticiper les risques et protéger efficacement les données critiques lors des appels d’offres sur les marchés publics, plusieurs bonnes pratiques peuvent être mises en œuvre :
- Utiliser des solutions de chiffrement robustes (chiffrement du disque dur, chiffrement des fichiers transmis)
- Authentifier les utilisateurs via un accès sécurisé à double facteur
- S’assurer que les données sont hébergées sur des serveurs agréés (HDS, ISO 27001) et, si possible, situés en Europe
- Vérifier régulièrement les autorisations d’accès aux documents confidentiels
- Maintenir à jour les logiciels de sécurité (antivirus, firewalls, anti-malware)
- Former les collaborateurs aux risques cyber et aux techniques d’hameçonnage
Ces actions permettent non seulement de se conformer aux exigences du commanditaire public, mais aussi de renforcer la confiance dans la relation commerciale et d’optimiser la gestion de l’information interne.
Plateformes de dématérialisation : sécurisation des échanges par les tiers de confiance
La plupart des procédures de marchés publics passent à présent par des profils acheteurs et plateformes spécialisées comme PLACE, AWS ou e-MarchesPublics. Ces outils proposent généralement des dispositifs de sécurité intégrés tels que :
- Connexion par certificat numérique
- Journalisation des échanges
- Historique des dépôts
- Notifications automatiques en cas d’anomalie
Il est essentiel de s’assurer que la plateforme utilisée dispose d’une certification de sécurité conforme à la législation française. En cas de doute, il est recommandé de contacter le service technique et de vérifier les mentions légales et politiques de confidentialité de l’outil de publication.
Cybersécurité et critère d’attribution des marchés publics
De plus en plus, la cybersécurité devient un critère d’analyse des offres dans le cadre des marchés publics. En effet, les acheteurs tiennent compte de la robustesse des dispositifs techniques mis en œuvre pour garantir la confidentialité, l’intégrité et la disponibilité des données échangées.
Les entreprises peuvent ainsi valoriser leur démarche de protection des informations sensibles pour marquer des points lors de l’évaluation technique ou organisationnelle. Les certifications, comme la norme ISO/IEC 27001, les audits de sécurité externe ou les partenariats avec des fournisseurs cloud certifiés, peuvent faire la différence au moment de l’attribution.
Vers une cybersécurité intégrée aux stratégies d’accès aux marchés publics
La protection des données sensibles ne se limite pas à la phase d’appel d’offres. Elle doit s’inscrire dans une stratégie globale de gestion des risques numériques. Cela inclut la mise en place d’une gouvernance SSI (sécurité des systèmes d’information), l’identification des actifs critiques, la sensibilisation continue des équipes, et l’adoption d’une culture de la cybersécurité à tous les niveaux de l’organisation.
Dans les années à venir, les attentes des donneurs d’ordre publics vont continuer d’évoluer vers des standards de plus en plus exigeants. Les entreprises qui anticipent ces évolutions renforceront leur position concurrentielle et gagneront en crédibilité dans leurs démarches commerciales, notamment dans les secteurs sensibles du BTP, de l’énergie, de la santé ou des infrastructures numériques.
Adopter une démarche proactive en cybersécurité n’est donc plus seulement un élément de conformité : c’est un véritable levier de différenciation, d’innovation et de sécurisation des opportunités offertes par les marchés publics.